lundi, mars 25, 2019

L'autre face : les aérosols

Le CO2 n'est pas le seul élément succeptible de modifier la quantité de chaleur que la Terre reçoit chaque année depuis l'espace et la quantité qu'elle est capable de réémettre vers l'espace.

Je reprends ici la figure 8.18 du 5eme rapport du GIEC qui rassemble les différents facteurs de réchauffement ou de refroidissement. On y voit par exemple en jaune, tout au dessus, les variations cyclique dûes aux taches solaires.
On y voit bien sûr aussi la contribution de type 'réchauffement' du CO2 et des autres gaz dits "à effet de serre" (baptisés WMGHC dans le rapport, ce qui nous rappelle qu'ils sont capables de se diffuser librement dans l'atmosphère contrairement à l'eau -- succeptible de former des nuages et des pluies).

Côté refroidissement, on a droit aux éruptions volcaniques, aux effets brutaux mais brefs et l'effet refroidissant des particules en suspension dans l'air (le terme prévu est 'aérosols atmosphériques'). Toutes les particules n'ont pas forcément un effet refroidissants et certaines ont aussi la possibilité d'interférer avec la formations des nuages, les rendant par exemple plus ou moins blancs (une histoire de taille de gouttelettes d'eau ... à creuser). La contribution de ces aérosols, c'est une donnée assez récemment introduite dans l'analyse du GIEC, avec des marges d'incertitude encore assez importantes.

Au final, c'est donc avec cette courbe en noir qu'il faudrait comparer la courbe d'évolution des températures, et pas uniquement avec la concentration en CO2 dans l'atmosphère. Ça permet par exemple de voir que les périodes où la température moyenne (cf. 'en Angleterre') redescend sur les 200 dernières années correspondent régulièrement à des périodes de forte activité volcaniques.

Enfin, ce serait l'idéal. Mais en fait je ne peux pas encore me servir de cette courbe-ci à ce stade du raisonnement, parce que du CO2, ça se mesure en part-par-million, pas en W/m². En clair, il faudra d'abord établir la relation entre concentration en CO2 et quantité de rayonnement infra-rouge émis par ce CO2.

edit: Une des premières références que j'ai trouvées sur cette relation, c'étaient les travaux de Myhre, directement référencés par le rapport du GIEC (et pointant eux-même des défauts d'anciens travaux du GIEC). Le radiative forcing (on va dire "forçage radiatif") est défini ici comme la variation d'irradiance entre l'époque pré-industrielle est l'époque courante (en bas de p. 2715). À l'époque (1998), on travaillait avec une simple formule mathématique (logarithme ou racine carrée) s'adaptant plus ou moins bien aux mesures. Une corrélation entre changement de température et 'forçage radiatif' dans ces conditions est donc équivalente à une corrélation avec le taux de CO2 puisqu'on se contentait d'estimer le forçage à partir du taux de CO2. On fait mieux depuis, heureusement. On note aussi que la relation entre les deux n'est pas linéaire, mais montre un impact plus fort d'une augmentation de 100ppm autour de 400ppm qu'autour de 800. A suivre. Mais ça reste quand-même très proche d'une relation linéaire entre 350 et 450ppm, hein.



dimanche, mars 17, 2019

Du côté du coeur ...

Avant de me lancer plus loin dans la compréhension des mécanismes permettant d'expliquer la différence entre la température observée sur Terre et la température que devrait avoir un corps noir recevant la même quantité de lumière que la Terre, je voulais éliminer une inconnue: la quantité de chaleur liée à la présence d'un coeur en fusion au centre de la planète.

Eh bien, pas grand-chose si on en croit les informations présentes sur Wikipédia. A savoir à peine 0.03% de la quantité de chaleur que dégage la Terre à sa surface. Je vais la tenir pour négligeable pour le reste de la discussion.

mercredi, mars 13, 2019

Pendant ce temps-là en Angleterre


Au cours de notre discussion sur le réchauffement climatique, Eric m'a sorti cette image montrant une évolution de la température en Angleterre qui peine à être influencée par les émissions de CO2. Avec un jeu de donnée qui remonte quand même à 1659!

Dans ce genre de comparaisons, il y aura quelques précautions à prendre. Tout d'abord, la zone géographique choisie pour suivre la température devra éviter les zones urbaines (on a pas envie de mesurer l'amélioration de l'isolant des maison au fil des siècels) et côtières (les masses d'eau sont lentes à réchauffer ou refroidir) le fait qu'on parle ici de "central England" (Bristol-Lancaster-Londres)met plutôt en confiance, et le site proposant le jeu de données (il s'agit du "hadcet") mentionne qu'ils ont pris soin de corriger l'effet des villes de -0.2°C. Pas parfait, mais en attendant d'avoir trouvé trois études qui prouveraient que c'est un mauvais choix, je vais leur accorder ma confiance là dessus aussi.

L'autre élément c'est évidemment de regarder (côté CO2) les concentrations globales dans l'atmosphère -- ou à défaut, les émissions globales. Regarder uniquement les émissions Anglaises, ce serait faire fi des effets de brassages des gaz capables de disséminer un "pic" de CO2 sur l'ensemble de la planète en l'espace d'un an, n'en déplaise au Docteur. Idéalement, il faudrait modérer ce taux de CO2 avec les autres effets découlant de l'activité humaine (antropogéniques ? je ne sais plus. Je ne suis pas météorologue), en particulier les concentrations en particules en suspension dans l'air (que le GIEC désigne sous le nom d'"aérosols") et qui ont généralement un effet refroidissant sur le climat ... une version réduite de l'hiver-qui-éteint-les-dinosaures, si je peux oser un appel à votre mémoire d'enfant sans pour autant devenir alarmiste.

Les conditions semblent donc réunies pour avoir un test pas idéal, mais valable, si ce n'est cette espèce de grosse flèche verte, tout rectiligne supposée nous montrer la "tendance" et nous convaincre que tout ça correspond à +0.26°C par siècle d'une façon totalement indépendante des émissions, et qui a plus un look de propagande que d'information scientifique.

source: MET office, retrieved on Mar 12th 2019.
Eh bien figurez vous que le bureau du MET met non seulement les données à notre disposition dans un format compatible avec gnuméric, mais nous offre en plus un aperçu de ces données en graphique, avec mise à jour quotidienne.

La valeur de 0.0 sur ce graphique, c'est la température moyenne sur l'ensemble du jeu de données, soit quelque part autour de 9.2°C. Vu comme ça, il y a très nettement deux périodes dans l'histoire des températures Anglaises sur les 3 derniers siècles: une longue période jusqu'aux alentours de 1940 où la température moyenne est presque toujours sous cette moyenne de 9.2, et une autre où on est presque toujours au-dessus.

Mais tout ça reste très fluctuant, et on aurait bien du mal à dire si c'est une augmentation progressive ou brusque rien qu'avec les mesures en bleu. Heureusement, le MET nous calcule également la moyenne sur les 10 dernières années en tout point (la courbe rouge). Plus facile à suivre mais encore très oscillante. Trop à mon gout pour qu'on puisse s'en servir pour observer une tendance de quelque type que ce soit.


J'ouvre donc tout ça dans mon tableur et je me calcule une moyenne avec une fenetre glissante de 30 ans de large. ça donne la courbe rose. je n'ai pas de valeur pour les 30 premières années du coup, évidemment, mais sur ce graphique, il devient évident que la tendance entre 1720 et 1930 est à un plat, et qu'après 1930, la tendance est à la hausse, avec une forte accélération de cette hausse à partir de 1990.

Pourvu qu'on se souvienne de l'inertie de 10-20 qu'une émission de CO2 peut avoir avant de se traduire en effet perceptible sur le climat, il devient difficile de continuer à dire qu'il n'y a pas de lien entre les deux.

Reste le dernier truc, cette ligne à 17°C de moyenne étiquetée "prévision du modèle pour 2100". La pente de la courbe rose observée ces 50 dernières années correspond à +1.5°C par siècle, et celle des 20 dernières années à +2.8°C par siècle. Alors effectivement, on retrouve une pente similaire entre 1700 et 1737, mais elle suivait là un demi-siècle de refroidissement, pas un demi-siècle de réchauffement plus lent. Tout à fait d'accord: 10.2 + 2.8, on serait à la fin du siècle vers 13°C de moyenne, pas 17, mais ça, ce n'est pas un modèle climatologique: c'est juste une ligne droite tracée au bout d'un graphique, comme un sales manager qui tente de convaincre son conseil d'administration. Et évidemment, le graphique d'origine ne nous dit en rien si ce modèle est un des plus pessimistes (la vitesse d'augmentation des facteurs de réchauffement est maintenue) ou non. Mais bon, ce genre de discussion, ce sera pour plus tard: il faudra d'abord que je retourne à la chasse aux infos. On ne sait pas non plus si ce 17°C est la valeur en Angleterre ou une valeur moyenne pour la Terre (estimée à 15°C actuellement ... les 17°C ne seraient plus qu'à 2°C et donc tout à fait plausibles).

Et non, on arrive pas avec le même résultat sur l'image d'origine: elle s'arrête en 2009, or 80% des années parmi les 10 plus chaudes (au niveau planétaire - HadCRTU4, cette fois) sont entre 2009 et 2018. Donc, si on vous colle un graphique de ce genre, exigez d'abord qu'il aille jusqu'à l'année en cours avant de passer autant de temps que moi dessus.

NOTE: l'inertie de 10-20 ans, c'est juste lu dans le rapport du GIEC pour l'instant. A analyser, mais ça ne me semble pas ridicule vu qu'il faut d'abord réchauffer une énorme masse d'océans -- facteur calorimétrique de 4180 -- avec de l'air -- facteur 1005 -- avant d'arriver à réchauffer durablement l'air lui-même.

dimanche, mars 10, 2019

L'atmosphère qui réchauffe la planète ?

C'est une théorie présentée sur Science, climat, énergie par le Pr. Geuskens, et qui aurait aussi été soutenue par un professeur Brésilien. L'idée étant qu'on peut calculer la quantité d'énergie correspondante à une colonne d'air en utilisant l'énergie potentielle des différentes sections et l'énergie cynétique interne à l'air (eh oui, ces petites molécules se déplaceraient à des vitesses proches de 500m/s -- information à vérifier) qui peut être calculée à partir de la pression (?) et de la température du gaz.

J'ai trouvé l'idée perturbante à la première lecture, en particulier parce que je voyais la température (à ajouter à celle de la planète considérée "corps noir") dépendre de l'énergie de l'atmosphère qui elle-même dépend de la température.

Supposons donc l'expérience "de Kynes" suivante: prenons une planète sans atmosphère en orbite à exactement 1UA d'une jumelle parfaite de notre Soleil. Ajustons son albedo à 0.1, comme dans le post du Pr. Geuskens Elle devrait avoir une température de -2°C. Téléportons-lui une masse de gaz équivalente à notre atmosphère à une température de 15°C pour qu'il se mette autour de la planète et lui confère une atmosphère...

Si ce gaz capturé par la planète possède une énergie E, la planète continue à être à -2°C. Elle peut utiliser l'énergie de sa nouvelle atmosphère pour se réchauffer, mais ceci suppose un transfert d'énergie.

Si ma mémoire est bonne, utiliser de l'énergie mécanique pour chauffer un corps se fait suivant la loi
Quantité_de_chaleur = coeff. * masse_à_chauffer * variation_de_température

Et donc, pour chaque degré gagné par la planète, sa nouvelle atmosphère va perdre de l'énergie. Si l'énergie E correspondait tout juste au 17°C manquant à la planète, ne se retrouverait-on pas avec un gaz au zéro absolu condensé à une altitude 0 ? ça n'aurait aucun sens. On ne pourra probablement continuer à chauffer la planète avec l'énergie contenue dans son atmosphère que tant que l'atmosphère est plus chaude que la planète elle-même, non ?

Si le post du Pr. Geuskens n'enfreint pas la loi de la conservation d'énergie, j'échoue lamentablement à comprendre son propos.

edit: après plusieurs échanges avec le Pr. Geuskens, la discussion en arrive à "Les basses couches atmosphériques (plus froides) ne peuvent transférer de la chaleur à la Terre (plus chaude) car ce serait contraire au second principe de la thermodynamique universellement admis depuis 200 ans." Je pense que ça valide le fait que la pression atmosphérique à elle seule ne peut participer à une élévation de la température de la surface. Affaire classée, il nous reste à comprendre par quels mécanismes la terre ne refroidit pas pendant la nuit comme les corps dénués d'atmosphère et dans quelle mesure le CO2 participe à ces mécanismes.

J'ai téléchargé le rapport du GIEC...

Enfin, quelques chapitres sur liseuse pour l'instant, parce que le rapport entier fait quand-même pas loin de 300MiB, que le chapitre 1 commence au-delà de la page 100 et parce que je ne suis pas devenu climatologue en l'espace de 10 ans. Mais j'ai quand-même pris les observations sur l'atmosphère (2), le cycle carbone (6), les aérosols (7) et le "radiative forcing" (8, ce qui se rapproche le plus de la notion d'effet de serre), histoire de mieux comprendre les phénomènes contestés par les climato-sceptiques. Je poursuis donc mes investigations à travers ce blog, parce que Facebook est juste catastrophique pour ça, quand une conversation commence à passer les 100 posts, dont la majorité demandent qu'on clique sur "afficher plus". A tout de suite.

Et pour que ce soit clair pour tout le monde, non, je ne suis pas devenu climatologue tout à coup. J'ai juste ma formation 'sciences fortes', mon bouquin sur la physique ondulatoire gagné aux demi-finales des olympiades de physiques et mon 20/20 à l'oral de physique en 1ere candi informatique il y a plus de 20 ans. ça ne pèse pas lourd, on est bien d'accord. Ah oui, et une brève introduction à la zététique.

Mais j'ai envie de comprendre. En particulier quand quelqu'un annonce que le réchauffement climatique est impossible pour une raison simple, alors la raison simple doit tenir la route et je creuserai le temps qu'il faudra pour comprendre comment elle peut être vraie (et que tout le GIEC l'ait loupée) ou pourquoi elle est fausse.